Est-ce qu'il ne fait pas trop froid là bas, est-ce que tu sais les fleurs sur le toit de toi, est-ce que tu sais pour l'arbre que l'on va devoir couper, est-ce que tu sais pour le vent qui agite les volets de la cuisine et secoue ton ombre sur le carrelage?
Maintenant il fait tout le temps nuit sur toi.
Tu reçois des lettres, on les donne à lire à tes vêtements, ça ne les déplie pas. Est-ce que je peux t'envoyer un peu d'Espagne, du bon champagne et deux,trois livres, maintenant qu'ils te foutent la paix avec leurs tuyaux dans le nez et dans le ventre, que tu n'as plus à te forcer à manger et à décrocher le téléphone?
Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi.
Est-ce que tu es partie te cacher dans un caillou, un plat à tarte, un nouveau-né, un tissu, un oeuf, une broderie et comment c'est maintenant qu'il fait nuit tout le temps?
Est-ce que ça va mieux, est-ce que c'est léger comme une bulle de laisser son corps juste là, tel un vêtement abîmé que l'on ne peut plus porter? C'est fini ce poids qui écrasait ton sourire ? Qui écrasait ton vente, qui t'écrasait ? Tu as pu t'échapper,dis ? Avec ton sourire en poche, maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi?
Même les yogourt au fruit dans le frigo ont un goût de fané. On a beau se mettre à la limonade toute neuve, du genre geyser de goulot tendre comme un orage de sucre dans l'oesophage, rien. Un cimetière de plus, de la nuit, du froid et encore une nouvelle couche de nuit. Nous on voit rien, on te voit plus, on n'y voit plus rien, on ne sait plus grand-chose. On marche dans la nuit et on ne te trouve pas, faut dire qu'on les confond toutes ces nuit noires, épaisses comme du tissu, pas beaucoup d'étoiles, tout se ressemble.
Il y a bien les souvenirs mais quelqu'un les a électrifiés et connectés à nos cils, dès qu'on y pense, on a les yeux qui brûlent.
Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi.
a-lombre-de-vos-sourires