Café Mémoire

Café très fort, très serré, très sucré, café noir,
Café qui coule, impalpable, café mémoire...
Le regard attiré par cet éclat profond
Et les yeux qui se perdent dans ce trou sans fond...

Un moment de calme face à la mer,
Où un sucre adoucit l'arrière goût amer.
Il s'y dissout comme tout rêve, toute vie,
S'efface par les jours, et comme toute envie.

Un morceau de métal recourbé tourne en rond,
Incarne le temps qui court en vain, se morfond.

Et prendre le café, cette action rituelle,
Habitude qui fait le lien entre les jours,
Entre les gens, événement perpetuel,
Est sur le temps qui passe un éternel retour,
Comme un regret caché, un souvenir qui glace.

Et voilà ! Le café déborde de la tasse.
Ta mémoire d'hier t'aide à vivre aujourd'hui,
Mais bien souvent, malgré toi, elle te salit.

Tu as fini ta tasse; alors tu la transmets
Pour qu'un autre y contemple, dans sa transparence
Et son propre café et son propre passé.

Qu'il essaie donc à son tour de saisir sa chance
De venir s'abreuver à toutes les mémoires,
Qui, dans la porcelaine, ont formé des fleurs noires.

(louise)