- Moi je trouve qu'on va bien ensemble...

J'aime être avec toi parce que je ne m'ennuie jamais. Même quand on ne se parle pas, même quand on ne se touche pas, même quand on n'est pas dans la même pièce, je ne m'ennuie pas. Je ne m'ennuie jamais. Je crois que c'est parce que j'ai confiance en toi, j'ai confiance en tes pensées. Tu peux comprendre, ça ? Tout ce que je vois de toi et tout ce que je ne vois pas, je l'aime. Pourtant je connais tes défauts. Mais justement, j'ai l'impression que tes défauts vont bien avec mes qualités. Nous n'avons pas peur des mêmes choses. Même nos démons vont bien ensemble ! Toi, tu vaux mieux que ce que tu montres et moi, c'est le contraire. Moi, j'ai besoin de ton regard pour avoir un peu plus de...de la matière ? Comment dit-on en français ? De la constance ?  Quand on veut dire que quelqu'un est intéressant à l'intérieur ?
- Profondeur ?
- C'est ça ! Moi je suis comme un cerf-volant, si quelqu'un ne tient pas la bobine, pfft, je m'envole... Et toi, c'est drôle, je me dis que tu es assez fort pour me retenir et assez intelligent pour me laisser filer...


Tout le problème de l'amour me semble être là : pour être heureux on a besoin de sécurité alors que pour être amoureux on a besoin d'insécurité. Le bonheur repose sur la confiance alors que l'amour exige du doute et de l'inquiétude.
Bref, en gros,le mariage a été conçu pour rendre heureux et pas pour rester amoureux. Et tomber amoureux n'est pas la meilleur façon de trouver le bonheur; si tel était le cas, depuis le temps, ça se saurait.
 
 
En pensant à ça, le coeur et l'estomac en marmelade, je me dis que finalement, c'est peut être ça la vie : beaucoup de désespoir mais aussi quelques moments de beauté où le temps n'est plus le même. C'est comme si les notes de musique faisait un genre de parenthèses dans le temps, de suspension, un ailleurs ici même, un toujours dans le jamais.
Oui, c'est ça, un toujours dans le jamais.
N'ayez crainte, Renée, je ne me suiciderai pas et je ne brûlerai rien du tout.
Car pour vous, je traquerai désormais les toujours dans les jamais.
La beauté dans ce monde.


Il est trois heures du matin, je suis confuse comme pas deux, mais c'est le seul moment où j'arrive à être plus sincère que timide. Alors tant pis si mes phrases boitent, au moins, elles vont où je veux.


a-lombre-de-vos-sourires

Les lampadaires nous regardent avec un air genre « Contrôle d'identité,s'il vous plaît. Veuillez sortir les étoiles de vos poches, de vos cheveux, de vos yeux. Tout ce qui brille, vous le déposez dans le sac en plastique : vos sourires, vous souvenirs, vous n'en aurez plus besoin là où vous allez maintenant. »


a-lombre-de-vos-sourires

 


Est-ce qu'il ne fait pas trop froid là bas, est-ce que tu sais les fleurs sur le toit de toi, est-ce que tu sais pour l'arbre que l'on va devoir couper, est-ce que tu sais pour le vent qui agite les volets de la cuisine et secoue ton ombre sur le carrelage?

Maintenant il fait tout le temps nuit sur toi.

Tu reçois des lettres, on les donne à lire à tes vêtements, ça ne les déplie pas. Est-ce que je peux t'envoyer un peu d'Espagne, du bon champagne et deux,trois livres, maintenant qu'ils te foutent la paix avec leurs tuyaux dans le nez et dans le ventre, que tu n'as plus à te forcer à manger et à décrocher le téléphone?

Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi.

Est-ce que tu es partie te cacher dans un caillou, un plat à tarte, un nouveau-né, un tissu, un oeuf, une broderie et comment c'est maintenant qu'il fait nuit tout le temps?

Est-ce que ça va mieux, est-ce que c'est léger comme une bulle de laisser son corps juste là, tel un vêtement abîmé que l'on ne peut plus porter? C'est fini ce poids qui écrasait ton sourire ? Qui écrasait ton vente, qui t'écrasait ? Tu as pu t'échapper,dis ? Avec ton sourire en poche, maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi?

Même les yogourt au fruit dans le frigo ont un goût de fané. On a beau se mettre à la limonade toute neuve, du genre geyser de goulot tendre comme un orage de sucre dans l'oesophage, rien. Un cimetière de plus, de la nuit, du froid et encore une nouvelle couche de nuit. Nous on voit rien, on te voit plus, on n'y voit plus rien, on ne sait plus grand-chose. On marche dans la nuit et on ne te trouve pas, faut dire qu'on les confond toutes ces nuit noires, épaisses comme du tissu, pas beaucoup d'étoiles, tout se ressemble.

Il y a bien les souvenirs mais quelqu'un les a électrifiés et connectés à nos cils, dès qu'on y pense, on a les yeux qui brûlent.

Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi.


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Et je lui souris. Pas le sourire standard de l'hypermarché; le sourire que son fils m'a rendu, mon sourire de baignoire sous les bombardements quand je passais les alertes à rajouter de l'eau chaude en lisant Gide pour conjurer la guerre, ce sourire qui chasse les peurs, les remords et les drames, qui réenchante le monde et détourne le malheur vers les méchants et les tristes. Mon sourire de fée.

« Estragon - [...] Allons-nous-en.
Vladimir - On ne peut pas.
Estragon - Pourquoi ?
Vladimir - On attend Godot.
Estragon - C'est vrai. (Un temps.) Tu es sûr que c'est ici ?
Vladimir - Quoi ?
Estragon - Qu'il faut attendre.
Vladimir - Il a dit devant l'arbre (ils regardent l'arbre.) Tu en vois d'autres ?
Estragon- Qu'est ce que c'est ?
Vladimir - On dirait un saule.
Estragon - Où sont les feuilles ?
Vladimir - Il doit être mort.
Estragon - Finis les pleurs. »

De maintenant cinq heures du soir jusqu'à l'heure où je m'endormirai je suis seul, parce que j'ai dit à tous mes amis que j'étais fatigué et que je ne voulais voir personne.

La petite fille pour laquelle j'ai soigneusement réservé ce temps libre n'a même pas pris la peine de téléphoner qu'elle ne venait pas.

Je découvre avec mélancolie que mon égoïsme n'est pas si grand puisque j'ai donné à autrui le pouvoir de me faire de la peine.

Petite fille il est tendre de donner ce pouvoir. Il est mélancolique d'en voir user

Les contes de fées c'est comme ça. Un matin on se réveille. On dit "ce n'était qu'un conte de fées...". On sourit de soi. Mais au fond on ne sourit guère. On sait bien que les contes de fées c'est la seule vérité de la vie.

On a un visage, on sort avec notre visage, le ciel vient immédiatement à notre visage, on a le visage avec du ciel dessus, on a le visage aurore, on la visage crépuscule, le visage zénith, le visage nuit, on a tous les visages du ciel entre aurore et crépuscule, entre crépuscule et aurore, on a le visage jaune, le visage gris, le visage mouillé, le visage violet ou neige ou brouillard, on sort avec notre visage, dès qu'on sort notre visage est moins notre visage, notre visage est avec du ciel, notre visage est fait avec du ciel, même si notre bouche est comme ci, même si on écarte notre bouche des deux pouces notre visage est avec du ciel qui est là, quels que soient nos yeux d'en ce moment, quelle que soit notre marche en avant de nous et en arrière de tout, le vient immédiatement et se met sur notre visage, le ciel fait un visage à notre visage, barbouille notre bouille, accentue ou diminue ou annule, le ciel est une des usines de notre visage

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